Poésie en prose

Je peins avec des mots les fragments du réel. Les couleurs évanescentes dans le fruit du poème. Tout est à croquer. La joie fugace et la déchirure céleste. Les insectes et les pétales montent vers le secret des nuages. Tournoient autour de nos soupirs. Aimer sans retenir. J'essaie pourtant de saisir l'éblouissement. Sa fuite pressentie dans ma mémoire poreuse. Et me revient la petite main d'Awa jouant avec l'écoulement du temps sur la plage de Warang. L'inclinaison de ton sourire à cet instant. La liberté des routes bleues de Nouvelle-Zélande.

Notre sommeil au pied des larmes du glacier. L'ivresse d'une maison de bois dans la tiédeur de Mendoza. Une amitié qui se scelle au pied du galop dans la steppe. J'oublie parfois le nom des lieux mais jamais les visages. Vertige du paysage des regards. Je peins avec des mots la trace des émotions. Sur le sable. Je peins avec des mots les fragments du réel. Les couleurs évanescentes dans le fruit du poème. 
© Juliette Mouquet